Pour réduire leur consommation énergétique, les gestionnaires de parcs d’éclairage extérieur sont poussés à accélérer la transformation de leurs pratiques et de leurs installations. Mais leurs choix négligent encore trop souvent les enjeux de biodiversité, voire contribuent à aggraver les nuisances lumineuses qui menacent la faune et la flore.
Consommer moins d’énergie pour éclairer nos villes, nos villages, nos infrastructures industrielles ou commerciales la nuit : voilà l’une des actions prioritaires à laquelle sont appelés les gestionnaires de parcs d’éclairage extérieur dans le cadre des plans de sobriété promus par le gouvernement.
Au-delà de l’urgence du moment, il est très probable que le contexte énergétique actuel accélère la transformation à long terme des pratiques et des installations d’éclairage, transformation dans laquelle de nombreux acteurs, à commencer par les collectivités locales, se sont déjà engagés ces dernières années.
Si cette recherche de sobriété énergétique est évidemment une bonne nouvelle pour le climat et les portes-monnaies, ses bénéfices pour la biodiversité posent davantage question. Non, moins d’énergie consommée pour l’éclairage extérieur ne rime pas forcément avec moins de nuisances lumineuses pour les espèces. Pire, l’évolution des pratiques peut générer dans certains cas des effets pervers qui aggravent la pollution lumineuse, et donc les perturbations sur le cycle nocturne de la faune et de la flore.
La conversion des installations à la technologie LED en est un exemple. En adoptant ce type de lampe, les gestionnaires de parcs d’éclairage réduisent drastiquement leur dépense énergétique. Mais certains en profitent alors pour augmenter le nombre de point lumineux ou le niveau d'éclairement, au lieu de les réduire. Un effet rebond désastreux pour la biodiversité, qui se retrouve soumise à des flux lumineux plus puissants après rénovation qu’avant. Pour protéger les espèces, diminuons le nombre de sources lumineuses et leur puissance d’éclairage.
La plupart des lampes à LED ont un autre impact négatif pour la faune et la flore : elles produisent une lumière froide (blanc tirant vers le bleu), qui perturbe plus gravement les comportements et la santé des espèces qu’une lumière chaude (jaune à orange). Une étude scientifique publiée en septembre dernier (*), et basée sur l’analyse de photos nocturnes de l’Europe prises depuis l’espace, confirme qu’au cours des dix dernières années la couleur du ciel européen a nettement blanchi et l’intensité lumineuse s’est accrue. Pour préserver la biodiversité la nuit, choisissons des éclairages LED à lumière chaude.
Par souci de sobriété, d’économie et de protection de la faune et la flore, de nombreuses collectivités locales ont déjà pris l’habitude d’éteindre leur éclairage public à certains moments, de manière partielle ou totale. Mais dans la très grande majorité des cas, ces extinctions n’ont lieu qu’en milieu de nuit, tandis que les lampadaires restent allumés le soir et au petit matin. Or, c’est durant ces périodes de début et de fin de nuit que l’obscurité est la plus stratégique dans les cycles de vie d’un grand nombre d’espèces. Pour réduire les impacts de la pollution lumineuse sur la biodiversité, éteignons l’éclairage dès que possible, y compris et surtout aux extrémités des nuits.
Sauvegarde du climat ou protection de la faune et la flore, il est urgent de ne pas choisir. Pour que la biodiversité soit pleinement prise en compte dans les politiques de transformation de l’éclairage extérieur, il faut passer dès maintenant d’un objectif de sobriété énergétique à un impératif de sobriété lumineuse.
(*) Sánchez de Miguel A., Bennie J., Rosenfeld E., Dzurjak S., Gaston K.J., "Environmental risks from artificial nighttime lighting widespread and increasing across Europe", Science Advances, 2022, volume 8, https://doi.org/10.1126/sciadv.abl6891
Ce communiqué de presse a été publié conjointement avec DarkSkyLab, bureau d'études et éditeur de logiciels spécialisé dans l'analyse de la pollution lumineuse.
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